« C’est vrai qu’on n’est pas un groupe
urbain» informe Guillaume. Et pour cause…ils sont berrichons ! Cela
pourrait paraître anecdotique, mais pourtant, quand on se plonge
dans l’œuvre des Blankass, cela devient évident. Mais reprenons
au début !
Après que les profs leurs aient mis un Zéro de Conduite
pendant environ 8 ans, les deux frères Ledoux, Guillaume et Johan
décident de se plonger dans une nouvelle aventure. C’est autour
d’un accordéon retrouvé au fin fond d’un grenier que Blankass
va naître. Naître de l’envie de Guillaume d’écrire des
chansons réalistes dans la veine de Bourvil, ou de Piaf…mais on
ne passe pas aussi facilement de la première partie des Clash à
de l’acoustique minimaliste pur et dur. C’est ainsi que sont intégrées
guitares et batterie. Nous sommes en 1990. Les Blankass partent à
l’assaut des bars pour plus de 200 concerts. La formation musicale actuelle
date de 1994 –batterie, basse, deux guitares, flûte à bec/sax’,
accordéon/chant-, soit un an après la signature chez Warner
Chappell. 1996 marque un tournant décisif dans la tribu Blankass
: leur premier album, au titre éponyme, se retrouve dans les bacs.
S’ensuit une tournée marathon qui va les conduire à une nomination
aux Victoires de la musique dans la catégorie Révélation
en 1997, date où le LP se retrouve disque d’or (100 000 albums vendus).
Ils enchaînent à la même période l’enregistrement
de « L’ère de Rien » qui sortira en septembre 98. Ils
en profitent aussi pour être à nouveau nominés aux
victoires de la zik mais cette fois dans la catégorie Groupe de
l’année, aux côtés de groupes comme Noir Désir.
Une fois n’est pas coutume, les Kassblan vont enchaîner avec une
longue tournée qui se ponctue par un Elysée Montmartre Sold
Out ! Pour une sombre histoire de contrat et de non respect de l’artiste,
le groupe engage une procédure judiciaire contre Musidisc-Universal.
Ces derniers les empêchaient de re-signer dans une autre maison de
disques, avec des menaces plus classes les unes que les autres – tentative
de publier, sans l’accord du groupe, un album non fini, menaces de poursuites
contre le nouveau label,…-. Mais après deux ans de procédures,
le verdict tombe en juin 2002 : David l’emporte face à Goliath,
les Blankass sont à nouveaux libres de faire ce qu’ils savent, ce
qu’ils aiment : de la musique. « L’homme Fleur » sort en avril
2003 chez Up Music.
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Blankass
© 2003 Vincent Moya |
Lorsque l’on y regarde de plus près, on peut comprendre que le
sextuor déchaîne les passions. Forts d’influences variées,
les blankass ont su –pu- proposer trois albums aux sonorités totalement
différentes. Si le premier album était très acoustique
comparé aux prestations scéniques du groupe, le second lui
se veut plus électrique et plus proche de ce qu’est le groupe sur
les planches. Quant au dernier-né, il surprend avec ses accents
pop inhabituels pour les berrichons. On y retrouve néanmoins la
patte blankass, c’est à dire, l’accordéon, la flûte
à bec et le saxo. Mais loin de nous l’idée de vouloir faire
rimer Blankass avec Rock-musette, quand on sait l’agacement que peut produire
ce genre d’étiquetage chez Guillaume : « C’est une image dans
laquelle on ne se reconnaît pas du tout. L’accordéon pour
l’image de l’accordéon, ça nous fait carrément chier.
» En effet s’il reste la pierre angulaire du groupe, celui-ci ne
sert qu’à « créer des thèmes avec la flûte,
dans un style un peu Irish. Il a une place rythmique, parfois il double
simplement les voix ou des guitares. » Ce serait aussi réducteur
à l’écoute des nombreuses influences musicales du groupe
dont le résultat finalement se trouve quelque part entre Clash et
Pogues.
L’évolution d’un album à l’autre est aussi marquante pour
les textes. Le point commun de l’ensemble de l’œuvre étant sans
nul doute la qualité. Ce n’est pas étonnant alors de savoir
que Guillaume, le parolier, est un admirateur de Brel : « Les paroles
d’une chanson doivent avant tout « sonner », sans que le sens
des mots soit dénaturé. Cette alchimie est difficile à
obtenir. Or, Brel était l’un des rares artistes à y parvenir,
avec des mots souvent très simples… Dans ses chansons, chaque mot
est à sa place, aucun synonyme ne pourrait s’y substituer. Quand
j’écoute « Amsterdam », même dix fois de suite,
j’ai toujours la chair de poule. Je lui voue une admiration sans bornes.
Je m’efforce d’atteindre cette osmose ente le son et le sens d’un mot et
n’ai pas envie de chanter n’importe quoi, aussi je consacre beaucoup de
temps à l’écriture des textes ».
Sur le premier album, il était énormément question
de portraits, de personnages plus atypiques les uns que les autres. De
l’alcoolo Léon qui a connu « Johnny qui était son meilleur
ami, / Et Guy Lux, et Garcimore et Henri Salvador ! », en passant
à la douce « Maria », de la Putain de « Celui
que j’aime », au poujadiste « Monseigneur », tout ça
sans oublier le « Garagiste », avouer qu’il y a de quoi repeupler
le Berry ! Pourtant on y trouve déjà des textes « prise
de conscience ». On y parle d’anti-militarisme dans « Traverser
les mers », de l’anti-clérical « Colère des Dieux
», sans oublier Le tube qui a mis sur orbite les Blankass : «
la couleur des blés », inspiré du Petit Prince de St
Exupéry.
Le premier album a été écrit sur une durée
plutôt longue contrairement à « L’ère de rien
». En effet pour le second opus, « L’ère de rien »,
les 6 compères se sont enfermés dans une maison appartenant
naguère à la famille Proud’hon, afin d’y rassembler leurs
idées et de mettre tout ça en forme. Il en ressort un thème
pré-dominant, voire unique : la COMMUNICATION.
Si les textes de « L’homme Fleur » sont dans le prolongement
de « L’ère de rien », ils sont plus matures, plus aboutis,
et tutoient même le nirvana comme par exemple « Pour la lumière
» ou « La croisée ».
Un des proverbes préféré des Blankass est tibétain
et dit ceci « Au loin j’ai vu quelque chose bouger. En me rapprochant,
j’ai vu que c’était un animal. Malgré ma peur, je me suis
approché et j’ai vu que c’était un homme. Je me suis encore
approché et j’ai vu que c’était mon frère. »
Pas étonnant alors d’entendre Guillaume parler « d’aller un
peu plus vers l’autre et d’avoir un peu moins les foies de son voisin.
On vit une espèce de drôle d’époque où l’on
peut passer une nuit à parler avec quelqu’un sur internet et jamais
lui dire bonjour dans la rue ».
La chronique ne serait être complète si l’on omet de dire
que comme tout vrai groupe, les Blankass se dégustent avant tout
en concert où le combo se retrouve comme un poisson dans l’eau.
D’ailleurs c’est aussi sûrement grâce à leurs prestations
énergiques, sincères et chaleureuses que le groupe s’est
forgé cette réputation. Réputation disant d’eux qu’ils
sont aujourd’hui l’un des meilleurs représentant de la scène
rock-folk française.