Quid !?!
Blankass



 

Lartscene.com

© 2003 Vincent Moya 
pour L’Art Scène


 

 
Blankass © 2003 Vincent Moya
Blankass
© 2003 Vincent Moya
« C’est vrai qu’on n’est pas un groupe urbain» informe Guillaume. Et pour cause…ils sont berrichons ! Cela pourrait paraître anecdotique, mais pourtant, quand on se plonge dans l’œuvre des Blankass, cela devient évident. Mais reprenons au début ! 

Après que les profs leurs aient mis un Zéro de Conduite pendant environ 8 ans, les deux frères Ledoux, Guillaume et Johan décident de se plonger dans une nouvelle aventure. C’est autour d’un accordéon retrouvé au fin fond d’un grenier que Blankass va naître. Naître de l’envie de Guillaume d’écrire des chansons réalistes dans la veine de Bourvil, ou de Piaf…mais on ne passe pas aussi facilement de la première partie des Clash à de l’acoustique minimaliste pur et dur. C’est ainsi que sont intégrées guitares et batterie. Nous sommes en 1990. Les Blankass partent à l’assaut des bars pour plus de 200 concerts. La formation musicale actuelle date de 1994 –batterie, basse, deux guitares, flûte à bec/sax’, accordéon/chant-, soit un an après la signature chez Warner Chappell. 1996 marque un tournant décisif dans la tribu Blankass : leur premier album, au titre éponyme, se retrouve dans les bacs. S’ensuit une tournée marathon qui va les conduire à une nomination aux Victoires de la musique dans la catégorie Révélation en 1997, date où le LP se retrouve disque d’or (100 000 albums vendus). 

Ils enchaînent à la même période l’enregistrement de « L’ère de Rien » qui sortira en septembre 98. Ils en profitent aussi pour être à nouveau nominés aux victoires de la zik mais cette fois dans la catégorie Groupe de l’année, aux côtés de groupes comme Noir Désir. Une fois n’est pas coutume, les Kassblan vont enchaîner avec une longue tournée qui se ponctue par un Elysée Montmartre Sold Out ! Pour une sombre histoire de contrat et de non respect de l’artiste, le groupe engage une procédure judiciaire contre Musidisc-Universal. Ces derniers les empêchaient de re-signer dans une autre maison de disques, avec des menaces plus classes les unes que les autres – tentative de publier, sans l’accord du groupe, un album non fini, menaces de poursuites contre le nouveau label,…-. Mais après deux ans de procédures, le verdict tombe en juin 2002 : David l’emporte face à Goliath, les Blankass sont à nouveaux libres de faire ce qu’ils savent, ce qu’ils aiment : de la musique. « L’homme Fleur » sort en avril 2003 chez Up Music. 

 
Blankass © 2003 Vincent Moya
Blankass
© 2003 Vincent Moya

Lorsque l’on y regarde de plus près, on peut comprendre que le sextuor déchaîne les passions. Forts d’influences variées, les blankass ont su –pu- proposer trois albums aux sonorités totalement différentes. Si le premier album était très acoustique comparé aux prestations scéniques du groupe, le second lui se veut plus électrique et plus proche de ce qu’est le groupe sur les planches. Quant au dernier-né, il surprend avec ses accents pop inhabituels pour les berrichons. On y retrouve néanmoins la patte blankass, c’est à dire, l’accordéon, la flûte à bec et le saxo. Mais loin de nous l’idée de vouloir faire rimer Blankass avec Rock-musette, quand on sait l’agacement que peut produire ce genre d’étiquetage chez Guillaume : « C’est une image dans laquelle on ne se reconnaît pas du tout. L’accordéon pour l’image de l’accordéon, ça nous fait carrément chier. » En effet s’il reste la pierre angulaire du groupe, celui-ci ne sert qu’à « créer des thèmes avec la flûte, dans un style un peu Irish. Il a une place rythmique, parfois il double simplement les voix ou des guitares. » Ce serait aussi réducteur à l’écoute des nombreuses influences musicales du groupe dont le résultat finalement se trouve quelque part entre Clash et Pogues. 

L’évolution d’un album à l’autre est aussi marquante pour les textes. Le point commun de l’ensemble de l’œuvre étant sans nul doute la qualité. Ce n’est pas étonnant alors de savoir que Guillaume, le parolier, est un admirateur de Brel : « Les paroles d’une chanson doivent avant tout « sonner », sans que le sens des mots soit dénaturé. Cette alchimie est difficile à obtenir. Or, Brel était l’un des rares artistes à y parvenir, avec des mots souvent très simples… Dans ses chansons, chaque mot est à sa place, aucun synonyme ne pourrait s’y substituer. Quand j’écoute « Amsterdam », même dix fois de suite, j’ai toujours la chair de poule. Je lui voue une admiration sans bornes. Je m’efforce d’atteindre cette osmose ente le son et le sens d’un mot et n’ai pas envie de chanter n’importe quoi, aussi je consacre beaucoup de temps à l’écriture des textes ». 

Sur le premier album, il était énormément question de portraits, de personnages plus atypiques les uns que les autres. De l’alcoolo Léon qui a connu « Johnny qui était son meilleur ami, / Et Guy Lux, et Garcimore et Henri Salvador ! », en passant à la douce « Maria », de la Putain de « Celui que j’aime », au poujadiste « Monseigneur », tout ça sans oublier le « Garagiste », avouer qu’il y a de quoi repeupler le Berry ! Pourtant on y trouve déjà des textes « prise de conscience ». On y parle d’anti-militarisme dans « Traverser les mers », de l’anti-clérical « Colère des Dieux », sans oublier Le tube qui a mis sur orbite les Blankass : « la couleur des blés », inspiré du Petit Prince de St Exupéry. 

Le premier album a été écrit sur une durée plutôt longue contrairement à « L’ère de rien ». En effet pour le second opus, « L’ère de rien », les 6 compères se sont enfermés dans une maison appartenant naguère à la famille Proud’hon, afin d’y rassembler leurs idées et de mettre tout ça en forme. Il en ressort un thème pré-dominant, voire unique : la COMMUNICATION. 

Si les textes de « L’homme Fleur » sont dans le prolongement de « L’ère de rien », ils sont plus matures, plus aboutis, et tutoient même le nirvana comme par exemple « Pour la lumière » ou « La croisée ». 

Un des proverbes préféré des Blankass est tibétain et dit ceci « Au loin j’ai vu quelque chose bouger. En me rapprochant, j’ai vu que c’était un animal. Malgré ma peur, je me suis approché et j’ai vu que c’était un homme. Je me suis encore approché et j’ai vu que c’était mon frère. » Pas étonnant alors d’entendre Guillaume parler « d’aller un peu plus vers l’autre et d’avoir un peu moins les foies de son voisin. On vit une espèce de drôle d’époque où l’on peut passer une nuit à parler avec quelqu’un sur internet et jamais lui dire bonjour dans la rue ». 

La chronique ne serait être complète si l’on omet de dire que comme tout vrai groupe, les Blankass se dégustent avant tout en concert où le combo se retrouve comme un poisson dans l’eau. D’ailleurs c’est aussi sûrement grâce à leurs prestations énergiques, sincères et chaleureuses que le groupe s’est forgé cette réputation. Réputation disant d’eux qu’ils sont aujourd’hui l’un des meilleurs représentant de la scène rock-folk française.